Décision No. 2/1996
Le Conseil constitutionnel
Réuni en son siège le 3/4/1996, sous la présidence de : son président Wajdi Mallat, son Vice-président Mohamed El-Majzoub, et la participation des membres, MM. : Jawad Ousairan, Adib Allam, Kamel Raydan, Michel Turkiye, Pierre Ghannage, Salim Azar, Antoine Khair, Khaled Kabbani.
Après examen du dossier du recours et le rapport du membre rapporteur, du 30/3/1996,
Suite au jugement avant-dire droit rendu en date du 20/3/1996, ayant exigé la désignation de deux membres du Conseil, les présidents Kamel Raydan et Antoine Khair, pour vérifier, le plus tôt possible, auprès de toutes les autorités compétentes la date de publication de l’annexe no 7 du Journal officiel, renfermant le texte de la loi no 490.
Considérant que les députés susmentionnés ont présenté un recours enregistré au greffe du Conseil le 15/3/1996, en vertu duquel ils requièrent la recevabilité du recours en la forme, et dans le fond, la suspension, intégralement ou partiellement, de la mise en application de la loi contestée, la publication du jugement de suspension au Journal officiel aux termes des dispositions de l’article 20 de la loi no 250 du 14/7/1993, jusqu'à ce qu’il soit déclaré que la loi contestée méconnaît, intégralement ou partiellement, les dispositions de la Constitution, et d'ordonner son annulation, intégralement ou partiellement.
Considérant que les Requérants déclarent en la forme ce qui suit :
- A la conclusion du premier paragraphe du recours les Requérants mentionnent que la loi a été « effectivement promulguée en date du 28/2/1962.
- Au deuxième paragraphe du recours, les Requérants indiquent que la loi « fut promulguée pratiquement en date du 1/3/1993 ».
En outre, ils ajoutent que « la loi ne portait pas la date déclarée de promulgation, contrairement au contenu de l’engagement du gouvernement vis-à-vis de la Chambre des députés lors de sa séance tenue le 28/10/1995 concernant la publication des lois aux annexes du Journal officiel sans qu’il ne porte la date effective de la publication selon le Président de la Chambre des députés au cours de ladite séance ».
Les Requérants concluent ce qui suit :
« Considérant que la loi relative au Conseil constitutionnel a donné le droit aux titulaires du droit constitutionnel, de saisir le Conseil dans un délai de quinze jours à compter de la date de publication de la loi au Journal officiel,
Considérant que la publication effective de la loi eut lieu le 1/3/1996 comme il est indiqué ci-dessus, et que par conséquent, il est nécessaire de recevoir le recours en la forme ».
Considérant que Messieurs les députés soumettent dans le fond, en appui à leur demande visant à la déclaration de l’inconstitutionnalité de la loi no 490, les motifs suivants :
1. La violation des principes et des règles de législation prévus à la Constitution.
2. La violation du principe de développement équilibré des régions prévu au Préambule de la Constitution.
3. La violation du principe de séparation des pouvoirs prévu au Préambule de la Constitution.
Considérant qu’ils exposent sous le premier motif que l’article 39 de la loi contestée qui dispose que « l’article 50 de la loi du budget de 1950 continue d'être en vigueur», vise à dissimuler des irrégularités ayant précédé la promulgation de la loi, justifiées par l’expression « l’article 50 sera toujours en vigueur », sinon il aurait été plus facile et plus juste au niveau législatif de reproduire le texte dudit article 50 au lieu de réanimer un texte mort par le principe de « l’annualité budgétaire» , sans toutefois oublier que ce texte représente un mandat législatif légitimant un accord financier résultant de l’exemption des taxes en l’absence d’un texte légal, en plus de la violation des procédures de législation, ce qui implique l’annulation de ce texte vu les violations constitutionnelles qu’il comporte.
Ils avancent, également, sous le deuxième motif, que la loi contestée méconnaît le paragraphe G du Préambule de la Constitution qui prévoit ce qui suit : « Le développement équilibré des régions, culturellement, socialement et économiquement, constitue une assise fondamentale de l’unité de l’Etat et de la stabilité du régime », et qui vise non seulement à établir la justice et l’égalité entre les Libanais, mais aussi à instaurer et affermir la loyauté envers la patrie, et que l’article 43 de la loi contestée portant sur les lois et programmes, a négligé l’allocation de crédits de manière équilibrée entre les régions, notamment les crédits assignés aux projets de construction, comme il ressort clairement du texte de l’article 43 de la loi contestée.
Considérant que Messieurs les Requérants allèguent finalement, au troisième motif, que les articles 9, 10 et 11 de la loi sur le budget portent sur un mandat accordé au gouvernement pour ouvrir des crédits budgétaires documentaires, et des crédits budgétaires de paiement au budget pour les emprunts contractés par l’Etat, et le droit d’ouvrir des comptes spéciaux du Trésor affectés aux emprunts, ainsi que des crédits pour rembourser les versements des emprunts payables avec le droit de déterminer les sources de leur couverture, et ce en vertu de décrets rendus en Conseil des ministres.
Messieurs les députés requérants concluent que ces textes portent sur une usurpation des mandats législatifs et constituent une atteinte aux attributions du pouvoir législatif auquel a été exclusivement conféré le pouvoir de légiférer en vertu de l’article 16 de la Constitution, et que lesdits articles sont contraires aux dispositions de l’article 88 de la Constitution sur la dépense publique, ce qui nécessite également son annulation.
Sur la base de ce qui a été exposé
En la forme :
Considérant que la loi contestée sur le budget de l’année 1996 fut publiée à l’annexe du numéro 7 du Journal officiel, et que l’annexe porte la date du 15 février 1996.
Considérant qu’il appert que le numéro 7 initial du Journal officiel fut publié le 15 février 1996, et que l’annexe spécial de ce numéro 7 où la loi sur le budget public fut publiée porte également la même date,
Considérant que la partie requérante a présenté son recours contre la loi no 490 susmentionnée, enregistré au greffe du Conseil le 15 mars 1996, en vertu duquel elle a indiqué que « la loi faisant objet de sa demande d’annulation, publiée à l’annexe spécial porte la date de 15 février 1996, a été pratiquement promulgué le 1/3/1996, mais que celle-ci ne porte pas la date déclarée de sa promulgation ».
Considérant que la partie requérante a aussi indiqué – sous un autre point– que la loi a été effectivement publiée le 28 février 1998, et par conséquent, elle a demandé que le recours soit reçu en la forme, étant donné qu’il fut présenté dans le délai des quinze jours prévu par la loi no 250 comme condition de recevabilité du recours.
Considérant que le paragraphe trois de l’article 19 de la loi
no 250, du 14/7/1993, relative à la création du Conseil constitutionnel prévoit ce qui suit :
« Le recours est soumis par l’autorité compétente à la présidence du Conseil constitutionnel dans un délai de quinze jours suivant la date de publication de la loi au Journal officiel, ou à un autre moyen officiel légalement adopté, sous peine de rejet du recours en la forme. »
Considérant que ce délai est d’ordre public, et qu'il appartient au Conseil constitutionnel de le soulever d'office.
Considérant que rien n'empêche le Conseil constitutionnel de vérifier les faits exposés.
Considérant que la commission à laquelle le Conseil a confié, en vertu de sa décision avant-dire droit du 20/3/1996, de vérifier la date de publication de l’annexe spéciale numéro 7 du 15/2/1996, a examiné les registres officiels auprès du service du Journal officiel, et a constaté que le délégué de la Chambre des députés a reçu les numéros relatifs à l’annexe no 7 du Journal officiel de 1996 le 26/2/1996, et qu’il a apposé sa signature sur l’accusé de réception.
Considérant que ceci indique que l’annexe renfermant la loi contestée fut délivrée à la Chambre des députés le 26/2/1996, ce qui prouve que la publication eut lieu dans un délai n'excédant pas cette date.
Considérant que cette date constitue, dans ce cas, la date à laquelle le délai de recours légal entre en vigueur,
Considérant que l’article 6 de la loi de procédure civile exige le respect des règles générales prévues au Code de procédure civile, dans l’éventualité où les autres lois et règles contiennent des lacunes.
Considérant qu’il convient de calculer les délais tel que prévu au Code de la procédure.
Considérant que le recours présenté par Messieurs les députés relatifs à la loi sur le budget public de l’an 1996, et enregistré au greffe du Conseil le 15 mars 1996, est soumis hors du délai légal des quinze jours, il convient par conséquent le rejeter en la forme.
Considérant qu’il n’y a plus de motif légal pour statuer sur le fond du recours.
Pour ces motifs
Et après délibération,
Le Conseil constitutionnel décide :
Premièrement : Le rejet du recours vu qu’il est présenté après l’expiration du délai de quinze jours fixé par la loi pour sa recevabilité.
Deuxièmement : La notification des autorités officielles compétentes de la présente décision et sa publication au Journal officiel.
Décision rendue le 3/4/1996